lundi 20 juillet 2015

Eiger Ultra Trail: quel parcours!

Trois semaines entre deux ultra, c'est peu, surtout quand ces trois semaines coïncident avec le début de mes vacances d'été, qu'il fait un temps fabuleux, peu propice à rester vautrée dans un canapé (ce qui, de tout de manière, n'est pas trop le genre de la maison, vous l'aurez compris :-) ).
Entre une série de sorties de vélo "de récup", une longue reconnaissance de l'UTMB et une suite de belles sorties (toujours censées être courtes, mais toujours plus longues que prévu) dans le Val d'Aoste, je finis par constater, quatre jours avant la course, que je suis plutôt fatiguée et que mon tendon d'Achille droit est douloureux. L'avant-veille de la course, je constate que mon coeur bat à 48 puls/mn au repos, contre 32 avant les mondiaux! C'est mauvais signe, mais bon, je me trouve plein d'excuses (la chaleur, le stress, etc..) et je reste très confiante puisque c'est bien connu, en ultra, c'est dans la tête que ça se joue :-) Non, trève de plaisanterie, je me dis que, c'est sûr, je n'aurais clairement pas mes chances sur une course de 20 km, mais que, sur la longueur, même si la forme physique générale n'est peut-être pas au top, il y a tellement d'autres paramètres qui rentrent en ligne de compte que cela peut bien se passer quand même, d'autant plus que, le footing de veille de course me rassure beaucoup: les muscles sont détendus, je me sens légère et dynamique, bref tout va bien!
Ce qui nous attend
Arrivée à Grindenwald, j'ai la mauvaise surprise de constater que la plupart des routes que j'avais repérées sur la carte pour rejoindre les postes d'assistance sont fermées à la circulation et que, la seule solution est d'emprunter les remontées mécaniques, solution qui me paraît trop compliquée pour être improvisée à la dernière minute et aussi trop onéreuse. J'appelle donc Julien, qui devait venir depuis Strasbourg dans la nuit pour m'assister et le dissuade de venir, me sentant vraiment trop de scrupules à lui imposer des heures de route pour aboutir à une probable grosse galère une fois sur place, à se stresser pour rejoindre ces postes d'assistance en train ou en télécabine.
Il est alors 17h, et il me reste peu de temps pour essayer de trouver une solution pour me passer d'assistance tout en me ravitaillant au mieux. Après un bref regard déprimé à tous les bons muffin spéciaux que je m'étais préparés exprès pour l'occasion, ainsi qu'à tous mes sticks de boisson énergétique hydrixir goût citron qui me conviennent si bien, je comprends qu'il est carrément impossible que j'emmène tout avec moi, sous peine de me transformer en sherpa.
Je n'emmène finalement que 2 muffin et un peu de boisson, décidant de prendre le risque de me servir des boissons et aliments fournis par l'organisation. Toutes ces réflexions me stressent un peu et, une fois n'est pas coutume, je ne trouve pas le sommeil avant 23h, si bien que je peine à me réveiller à 3h30. 
A 4h30, c'est parti! Après quelques km, je prends vite la tête de course, m'efforçant de courir détendue, de bien respirer et d'économiser mon énergie. On s'élève rapidement en direction des crêtes, le paysage s'annonce superbe et la journée est belle. Le début est plutôt roulant, la première descente se faisant d'ailleurs carrément sur une route bien raide. En bas de cette route, je suis rejointe par Mercedes, coureuse espagnole avec laquelle j'avais déjà bien lutté à la CCC 2013.
Je mets donc un sérieux coup d'accélérateur dans la montée suivante, ce qui me permet de doubler pas mal de monde. Le parcours devient plus technique, les sentiers étroits et caillouteux, je commence à bien m'amuser. Dans cette première section de course, durant laquelle les vues sont somptueuses (On voit parfois l'Eiger sur notre gauche et les lacs de Thun et Brienz en contrebas), il y a toute une série de chemins traversants de toute beauté: ludiques, techniques, bref, je suis très contente d'être là.
Au Faulhorn, point culminant de la course, je rejoins Christophe Le Saux, qui m'encourage gentiment, puis j'attaque la superbe descente qui suit en compagnie de Freddy Thevenin et d'un autre coureur, avec lequel je vais d'ailleurs cheminer très longtemps.
Plus loin, on entame la longue, raide et cassante descente qui nous mène à mi-parcours, à Burglauenen. J'ai déjà les cuisses en feu et ma douleur au tendon d'Achille devient plus forte, mais le moral est bon. Seul problème: à improviser mes ravitaillements, je mange beaucoup moins que prévu et, je réalise à Burglauenen (52km/3200mD) que, en 6h15 de course environ, j'ai dû manger un muffin et une banane +2-3 coca et 1,5 l de boisson énergétique. Je m'enjoins alors fermement à me servir à chaque ravitaillement.
A la sortie du ravitaillement de Burglauenen
La 2e partie de course commence par une longue montée, qui se passe assez bien, même si, en arrivant en haut, je commence à être proche de vomir. Heureusement, je parviens à manger une banane, ce qui fait instantanément disparaître ce sentiment de malaise. On se rapproche gentiment de l'Eiger, mais par des chemins éprouvants, qui ne cessent de monter raide... et de descendre raide. Dur... dur. Le malaise me reprend 2 heures plus tard, alors que je monte une superbe crête de moraine qui longe l'Eiger. 
On passe par là! (Le sentier que l'on voit sur la droite)
J'ai vraiment besoin de manger car, la boisson énergétique fournie par l'organisation ne me convient pas, si bien que cela fait un moment que je tourne à l'eau. Heureusement, cette montée superbe mais assez terrible fait place à une descente magnifique, ce qui fait que, passé les premiers hectomètres durant lesquels les jambes étaient plus que flageolantes, je me sens bien. Malheureusement, le ravitaillement suivant n'est qu'un ravitaillement liquide et je ne peux avaler qu'un coca, en espérant que son sucre suffira à me nourrir. Je me hâte donc de rejoindre le ravitaillement d'après, que je pense être tout en bas de la vallée, avant la dernière montée. Mais arrivée au terme de cette interminable descente de 1500 mètres de D, je constate que le ravitaillement est au moins 2km plus haut! Argh! Mais j'ai besoin de manger, moi!!
Si je fais le compte, j'en suis à plus de 11h de course et ma dernière 1/2 banane a été avalée près de 3 heures auparavant. Cela fait un peu juste et je regrette amèrement de ne pas avoir été plus prévoyante en emportant une ration de secours. 
La montée vers l'avant-dernier ravitaillement se passe finalement plutôt bien, malgré une envie de vomir de plus en plus insistante. Mais le chemin est superbe, passant par des gorges somptueuses. Cela fait plusieurs heures que je n'ai plus aperçu le moindre concurrent et je peine à me motiver pour vraiment relancer lorsque la pente le permet. Je sens bien que je pers du temps, à marcher là où je devrais courir mais c'est peine perdue, je n'arrive pas à me faire violence et j'ai aussi les jambes et surtout le tendon d'Achille trop douloureux pour conserver une foulée dynamique.
Dans la dernière portion
L'avant-dernier ravitaillement, que j'atteins presque les larmes aux yeux tellement j'ai envie de manger.... n'est qu'un poste liquide!
Bon, et bien il ne reste que 2km avant le suivant, cela devrait aller, d'autant que le chemin est superbe et ombragé. Mais il est quand même raide et je n'avance plus! J'enlève ma musique, écoutée sans interruption depuis le départ, pour essayer de ne pas trop m'endormir, mais cela devient dur. 
Au ravitaillement suivant, je crois avoir suscité quelques regards étonnés lorsque je me jette sur le coca et une demi-banane comme une sauvage. Enfin! Lorsque je repars dans la descente finale, j'ai mal au ventre et je titube sur la piste. Je me moque un peu de moi-même, en me disant que je dois faire peine à voir.
Un ou deux km plus loin, cela va beaucoup mieux et je retrouve une foulée à peu près normale, ce qui me permet d'arriver finalement assez vite en bas de Grindenwald. Une courte mais raide montée et me voilà enfin à l'arrivée, heureuse et émue. Je m'étais fixée une arrivée en 13h et je termine en 12h45, donc l'objectif est plus que rempli, malgré les difficultés du jour.

En conclusion, je suis vraiment ravie d'avoir participé: le parcours est magnifique et, quoiqu'on m'en avait dit avant, il est largement assez technique et difficile pour moi, vraiment un cran au-dessus de la CCC, par exemple. L'organisation est au top. Quand à moi, j'ai encore appris beaucoup sur moi-même et pris la mesure de l'importance de bien se ravitailler et de bien connaître le parcours. Encore une fois, merci à tous ceux qui me suivent, me soutiennent et m'encouragent. Je vous dois beaucoup!